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Budget Développement Durable : Carrières-sur-Seine exemplaire
Budget Développement Durable : Carrières-sur-Seine exemplaire
La Ville de Carrières-sur-Seine reconnue pour son engagement en faveur de l’environnement.
La collectivité a souhaité soumettre son budget à une analyse environnementale complète. Cette démarche vise à évaluer l’impact de ses politiques publiques sur le développement durable et à orienter, à terme, ses choix budgétaires vers une trajectoire plus écoresponsable. Carine Bryselbout, directrice de Seine & Yvelines Environnement, revient sur l’analyse menée pour la Ville.
1/ Pourquoi évaluer l’impact environnemental des politiques municipales ?
Carine Bryselbout : Depuis 2024, la loi de finances impose aux collectivités locales d’évaluer l’impact écologique de leurs dépenses via un outil spécifique : le Budget Vert. Cette démarche, obligatoire pour les collectivités de plus de 3 500 habitants, vise à améliorer la transparence des budgets publics et à orienter progressivement les décisions vers des choix plus durables.
2/ Pourquoi Carrières-sur-Seine a fait appel à Seine & Yvelines Environnement ?
CB : La municipalité, déjà engagée sur ces questions, a souhaité dépasser le cadre strict de l’obligation légale et évaluer plus largement l’impact de l’ensemble de ses politiques publiques en confiant cette mission à Seine & Yvelines Environnement, groupement d’intérêt public spécialisé dans l’accompagnement de projets territoriaux durables.
Plutôt que d’opter pour une autoévaluation, elle a préféré privilégier un acteur extérieur, garant d’un regard indépendant et d’une méthodologie éprouvée.
3/ Pourquoi réaliser une analyse plus large que le Budget Vert obligatoire ?
CB : La méthodologie du Budget Vert présente d'importantes limites, principalement en raison de son périmètre restreint. En effet, elle ne couvre que les dépenses d'investissement réelles (excluant celles de fonctionnement) et se concentre uniquement sur 17 dépenses spécifiques, représentant ainsi seulement 10% du budget total de la ville de Carrières-sur-Seine. Par ailleurs, le Budget Vert analyse ces dépenses selon 6 axes, dont un seul est obligatoire pour l'année 2024 (l'impact sur "l'atténuation du changement climatique").
Chaque dépense est ensuite classée en trois catégories d'évaluation (favorable, neutre, ou défavorable). Ce cadre conduit à une analyse limitée et peu approfondie, offrant ainsi des informations insuffisantes pour les décideurs publics.
4/ Quels sont les résultats de cette analyse obligatoire restreinte pour la ville de Carrières-sur-Seine ?
CB : Afin de rendre l’analyse du Budget Vert plus représentative, nous l’avons étendue en intégrant 4 des 6 axes qui deviendront obligatoires à partir de 2027 : l’atténuation du changement climatique, l’adaptation au changement climatique et la prévention des risques naturels, la gestion des ressources en eau, ainsi que la préservation de la biodiversité et la protection des espaces naturels, agricoles et forestiers.
Sur la base de ces quatre axes, il ressort que 6% des dépenses globales de la Ville ont un impact favorable, 1% un impact neutre, 1% un impact défavorable, tandis que 2% ne sont pas cotées. Enfin, 90% des dépenses n’ont pas été analysées, car elles ne relèvent pas du périmètre restreint de cette version du Budget Vert.
5/ Quelle méthode élargie avez-vous choisie pour analyser l’impact des dépenses de la Ville sur le développement durable ?
CB : Seine & Yvelines Environnement a choisi une méthode fondée sur les 17 Objectifs de Développement Durable (ODD) de l’ONU. Contrairement au Budget Vert, centré sur l’environnement, cette approche englobe aussi les aspects sociaux et économiques.
Elle repose sur une conception du développement durable qui répond aux besoins du présent sans compromettre l’avenir, en écho à la pyramide de Maslow et aux attentes fondamentales des citoyens. Cette méthode a été reconnue par l’AFNOR et primée à plusieurs reprises.

6/ Concrètement, comment avez-vous procédé ?
CB : L’analyse a porté sur l’ensemble des 13 000 lignes de dépenses réalisées en 2024, représentant 28 millions d’euros (dont 9 M€ d’investissement et 19 M€ de fonctionnement).
En complément, des entretiens ont été menés avec les responsables de six directions clés (Urbanisme, Éducation, Espaces Publics, Finances, Patrimoine, Systèmes informatiques). Chaque dépense a été évaluée selon sa contribution aux ODD, en identifiant les effets directs ou indirects.
7/ Quels sont les résultats de votre analyse ?
CB : Cette analyse des dépenses de la Ville met en évidence des choix budgétaires vertueux et une stratégie globale, cohérente et intégrée en faveur du développement durable.
Grâce à la méthode développée par Seine & Yvelines Environnement, 96% des dépenses ont pu être évaluées, contre seulement 10% avec l’approche du Budget Vert. Il en ressort que 78% de ces dépenses ont un impact positif sur le développement durable, couvrant 15 des 16 Objectifs de Développement Durable (ODD) analysés.

Ces résultats traduisent une prise en compte approfondie des enjeux environnementaux, sociaux et économiques dans l’allocation des ressources, ainsi qu’une forte maturité des services publics dans leur appropriation de ces enjeux.
Cela se reflète dans des stratégies variées et efficaces :
- une politique alimentaire et éducative respectueuse de la loi Egalim et axée sur les produits locaux,
- des achats publics durables,
- des initiatives de mutualisation interne,
- ainsi qu’une incitation à l’usage de mobilités alternatives à faibles émissions.
La collectivité agit également sur :
- la réduction de la consommation énergétique, notamment via l’optimisation de l’éclairage public,
- développe une politique ambitieuse de végétalisation pour répondre au changement climatique,
- et met en œuvre une politique numérique orientée vers la sobriété des usages et des équipements.

8/ Certaines dépenses ont-elles des effets négatifs ?
CB : Malgré les efforts de la collectivité et les stratégies responsables mises en place, trois grandes thématiques environnementales du développement durable affichent des impacts négatifs.
Ces effets sont principalement liés à la consommation de ressources pour les travaux de bâtiment et de voirie, l'achat de matériel neuf (informatique, outils de chantier, fournitures scolaires) et l'utilisation d'énergie non renouvelable, comme les 70% de chauffage au gaz. Les émissions de gaz à effet de serre générées par la mobilité thermique sont également prises en compte.
9/ En quoi Carrières-sur-Seine vous semble-telle exemplaire ?
CB : L’ensemble des services municipaux fait preuve d’une grande maturité dans l’intégration des enjeux de développement durable à travers les choix de dépenses. Cette prise en compte s’inscrit aujourd’hui dans une stratégie cohérente et bien structurée, mise en oeuvre de manière harmonieuse par toutes les directions, et intégrée presque instinctivement dans leurs pratiques.
Contrairement à d’autres collectivités où cette culture reste cantonnée à un service spécifique, souvent portée par une seule personne engagée, ou limitée à un domaine particulier, à Carrières-sur-Seine, chaque sujet est traité avec une vision globale, coordonnée et responsable, visant à maximiser les impacts positifs tout en recherchant l’efficacité.
Cette conscience collective de la responsabilité socio-environnementale dans l’action publique est rare parmi les collectivités que nous accompagnons. C’est pourquoi je me réjouis de pouvoir citer Carrières-sur-Seine comme un exemple inspirant, prouvant qu’un tel engagement est non seulement possible, mais peut aussi devenir une évidence.
10/ Existe-t-il toutefois des pistes d’amélioration ?
CB : Les effets négatifs constatés sont intrinsèquement liés à l'action territoriale, aux aménagements et aux travaux qu'elle implique, lesquels engendrent inévitablement une consommation de ressources et des émissions de gaz à effet de serre difficiles à contenir. Il semble complexe d'aller bien au-delà des actions déjà engagées par la Ville.
Pour progresser davantage, deux pistes pourraient être envisagées :
- d'une part, renforcer les exigences environnementales dans les cahiers des charges de certains fournisseurs locaux, notamment pour la restauration lors d'événements ;
- d'autre part, solliciter un bureau d'études spécialisé pour mener une analyse du cycle de vie des produits et affiner l’évaluation de leur impact environnemental.
De manière générale, la Ville a déjà mis en œuvre une démarche vertueuse qu’il est nécessaire de saluer. Je l’encourage vivement à poursuivre dans cette voie !
> Consultez l'intégralité du rapport de Seine & Yvelines Environnement

Date de publication
22/05/2025
Dernière modification
22/05/2025